Elle a lancé le club des chief happiness officers et créé l’optimisme.com. Catherine Testa est une mordue de la vie, on le voit dès le premier coup d’œil.
Interview par Raphaëlle Duchemin
Publié le 5 janvier 2022
Elle réussit tout ce qu’elle touche. Normal, Catherine Testa est une bosseuse. Et quand elle se met en tête d’écrire un livre, de repeindre une pièce ou de se lancer dans un nouveau défi, elle le fait à fond, ne compte ni ses heures ni son énergie.
Devenue en quelques années une influenceuse très suivie et courtisée sur les réseaux sociaux, la normande distille ses conseils en optimisme, elle déjà conquis la confiance de près de 300 entreprises en France. « Pourquoi m’a t’on suivie ? Je ne sais pas » s’interroge-t-elle avant de tenter une réponse : « probablement parce que je suis arrivée avec de l’optimisme rationnel et qu’on s’est dit, tiens, elle a des jugements qui ne sont pas complètement à côté de la plaque. Elle n’est pas complètement naïve. Elle ne regarde pas la vie avec des lunettes roses ».
Une scientifique au service de l’optimisme
Car Catherine Testa est avant tout une scientifique. Elle a d’abord mis son talent au service de la physique quantique puis, avec un master en science et génie de l’environnement, au service du développement durable. De fait, elle le reconnait volontiers elle-même, l’optimisme n’était pas vraiment son rayon au départ : « Quand on travaille dans ce domaine, on n’est pas forcément la plus optimiste du monde. Il faut être clair, tous mes copains sont des collapsologues persuadés que le monde va s’effondrer, ils ne réfléchissent qu’à ça en permanence. J’ai cherché comment avoir un impact à mon échelle en me disant que soit je continuais à lire les rapports du GIEC, je continuais à parler seulement de RSE, de développement durable et peut-être de catastrophe, soit j’allais plutôt essayer de parler d’enthousiasme, de montrer que certains acteurs agissent. C’est comme ça que je me suis dit que j’allais parler d’optimisme et essayer de remettre au goût du jour ce mot, dans le monde de l’entreprise, entre autres. »
A bien y réfléchir, Catherine se souvient avoir toujours eu ce penchant : « A l’école, au primaire déjà, je concevais des jeux dans un petit cahier pour mes camarades. »
L’altruisme l’avait même poussée un temps à se dire qu’elle deviendrait psychiatre : « c’est bouché, m’a-t-on répondu à l’époque », dit-elle dans un éclat de rire.
Le déclic
Aujourd’hui, c’est pourtant à notre psyché qu’elle s’adresse ; après un long détour par le monde digital, après avoir travaillé à New York ou Barcelone, elle est revenue en France et à ses premières amours, à ce souci de l’autre.
Son terrain d’expression depuis 2016 ? Le monde du travail.
« Il doit se transformer. Il faut créer des climats qui soient sains. »
En France, il a fallu du temps avant de comprendre que l’optimisme au travail n’était pas le dernier phénomène à la mode mais un véritable besoin qui s ‘exprimait. Ce sont ces certitudes, ces habitudes que Catherine vient bousculer, quitte à enfoncer des portes qui devraient être déjà ouvertes: « parce que l’entreprise n’est pas forcément quelque chose de pénible», explique celle dont le pseudo n’est autre que @sionsouriait : « on peut être content d’aller bosser le matin. Un temps, on s’est dit que le bonheur au bureau, c’était mettre un babyfoot, faire venir des petits dej’ et organiser des team building, mais on est tombé très vite dans la caricature, dans la dérive ».
D’où la création de l’optimisme.com.
Son emblème, un citron.
Pour la couleur bien sûr mais aussi pour le côté acidulé du fruit… Car notre spécialiste du développement personnel a bien l’intention de réveiller les entreprises qui dorment sur leurs acquis.
« Ce job nécessite d’accompagner le monde de la formation et la communication non-violente, et tout autant la transformation individuelle. Mettre la juste personne au juste poste, dans la juste entreprise. Comme tous les sujets, d’abord on s’en moque, on se dit que c’est idiot. Tant qu’on n’a pas compris, tant qu’on ne creuse pas, on fait un déni, tout simplement. Ce qui est en train d’arriver, c’est qu’aujourd’hui, les salariés osent lever la main en disant : « – moi, j’ai envie de changer les choses dans mon équipe. »
Il faut savoir qu’on était dans des entreprises où parfois on disait à celui qui était sympa “sois pas trop sympa avec ton équipe parce que la mienne, elle a envie d’aller chez toi.” On était dans une sorte de norme et là, je suis quasi convaincue que le centre de gravité de la norme est en train de se déplacer. »
Verre à moitié plein
À coup de colloques, de séminaires, de web conférences et de livres, Catherine ouvre la voie. Et propose une autre vision du monde qui nous entoure. Question de libre arbitre ? Peut-être bien : « Je me suis beaucoup intéressée au poids des algorithmes. J’ai deux téléphones, un qui tourne sur des médias traditionnels et un second sur d’autres types de médias. Je me rends compte qu’on voit des réalités différentes. Peu importe ce qu’on va regarder au quotidien, on a besoin d’optimisme et on peut avoir l’impression que le monde va très bien si on regarde des médias comme Visible. Je vais me dire “- ah c’est incroyable. Il y a des gens qui agissent !” Ca va me donner confiance, et puis, tout d’un coup, je vais regarder quelque chose sur mon autre téléphone, je vais me dire “ – ah, vraiment le monde va mal !” Et ça, c’est le choix de là où on porte le regard.
Une grande timide
À la voir enchainer les explications, planter ses yeux dans la caméra, on a du mal à imaginer que la Catherine Testa qui se tient devant nous est une grande timide, qu’elle n’est jamais si bien que quand elle s’enferme avec une thèse à décortiquer ou qu’elle bêche, pioche ou plante chez elle, en Normandie.
Car oui, comme beaucoup d’entre nous, la crise l’a poussée à quitter Paris. Elle a embarqué avec elle toute son équipe après le confinement.
Si elle cultive aujourd’hui son jardin au propre comme au figuré, Catherine Testa a mis du temps a comprendre que tout est possible et nous engage à faire de même : « Je me suis rendu compte que j’avais une valeur ajoutée, et surtout, je crois que je l’ai dit.»