Success story d’une self-made woman

Inès Leonarduzzi, entrepreneure et écrivaine.

Ines Leonarduzzi s’est faite toute seule. Aujourd’hui, elle cumule plusieurs casquettes : écrivaine, présidente de Digital For The Planet, Directrice France de Mtartagency, égérie… Le beau et le bien guident ses pas.

Interview par Raphaëlle Duchemin
Publié le 03/05/2022

Elle nous reçoit dans les locaux de MTartagency, rue Cadet à Paris. C’est son nouveau QG. Quand on arrive, Ines Léonarduzzi est en pleine séance d’interview avec une équipe de télévision étrangère. La jeune femme sourit, termine de répondre en anglais et se laisse élégamment tomber telle une plume dans un fauteuil design. Autour d’elle, de l’art partout où se posent nos yeux.

C’est le nouveau challenge d’Ines la touche à tout, Directrice France de cette agence qui vise à démocratiser l’accès à l’art.

« Ce que je trouve dans l’art, c’est tout ce que ça réveille chez l’humain. Ça réveille une sensibilité, ça réveille l’inspiration, la créativité, la douceur, la tendresse, l’empathie, toutes ces notions qu’on ringardise et que je crois qu’il faut réhabiliter. »

Et elle poursuit :

« En fait, moi, mon métier, c’est d’essayer de contribuer à faire les choses un peu mieux, là où elles sont un peu ébréchées. »

Et des choses cassées fêlées abimées, dans la société d’aujourd’hui il y en a beaucoup : c’est la raison pour laquelle elle a écrit Réparer le Futur. Avec les outils dont elle dispose Ines reprise, recolle et tente de fermer des plaies. Avec du beau aujourd’hui mais aussi avec du bon. Le bon c’est son autre casquette, celle de citoyenne qui un jour a eu l’idée de créer une ONG pour rendre le numérique plus responsable.

« Digital for the Planet est présente maintenant dans le monde entier, elle a beaucoup travaillé sur le plan du lobbying éthique, d’éducation, de l’accompagnement des entreprises.»

Comment lui est venue cette idée ? Ines se souvient :

« À cette époque-là, je suis consultante dans le numérique, je travaille pour des grands groupes, je voyage dans le monde entier. Mon boulot, c’est de faire en sorte qu’il y ait du digital partout. » 

On est en en 2016 et la jeune femme qui est toujours en train d’observer ce qui se passe autour d’elle se surprend à s’interroger.

« Tu te demandes mais comment on peut développer des outils aussi performants et à côté, on n’arrive pas à trouver de solutions à des enjeux de taille comme, l’éducation, la santé, la faim dans le monde, les inégalités. »

Ines prend alors conscience qu’il y a un trou dans la raquette :

« Je me disais qu’il y avait un problème que ces outils n’étaient pas appliqués aux bonnes choses.
J’ai terminé la mission que j’étais en train de faire, j’ai quitté mon job, j’ai vendu mon appart et je me suis lancée. Et j’étais autrement choquée quand je me suis rendu compte que j’avais un boulevard. D’ailleurs, c’est comme ça que j’ai été propulsée ».

Elle sourit car quand elle s’empare du sujet- se souvient- elle- « les gens s’attendaient à une grande scientifique, une environnementaliste, une chercheure, et en fait pas du tout, ils ont eu affaire à une petite jeune fille qui n’avait même pas 30 ans, et qui arrivait sur un sujet éminemment politique, éminemment majeur, un des sujets majeurs du XXIᵉ siècle »

A dire vrai avec le recul même Ines est surprise par l’engouement que prend son idée : De sa chambre seule ou elle a pensé les choses elle va être rejointe par des dizaines de milliers de personnes. Avec des grandes entreprises, elle va rédiger avec son ONG des amendements co-écrits avec différents gouvernements dont le gouvernement français.

De cette expérience entamée il y a 6 ans Ines en a tiré une leçon :

« ce que ça révèle, dit-elle c’est que quand on est convaincu de quelque chose, qu’on visualise la destination, l’arrivée, on peut vraiment tout créer. »

Et cette persévérance est un de ses traits de caractère, enveloppée dans une infinie douceur.

« Je n’ai jamais eu peur de ma capacité d’y aller, et d’ailleurs, « Digital For the Planet » tu l’auras compris, ça a décollé d’un coup, je n’avais pas idée que ça prendrait cette ampleur. Je crois que j’ai mis trois ans avant d’être à l’aise dans mon job et à ne plus souffrir, à prendre du plaisir, parce que les trois premières années, j’ai réalisé que j’avais taillé un costume beaucoup trop grand pour moi. »

Car la jeune femme n’est pas spontanément du genre à se mettre en avant :

« Vous savez, j’étais le genre de petite fille qui s’excusait d’exister, je ne faisais pas de bruit, je manquais beaucoup d’assurance et du coup, je pensais que ma place était nulle part.

D’ailleurs, j’ai commencé l’entrepreneuriat très tôt et on m’a dit :

« Oh la la, c’est audacieux, dis donc, tu dois avoir confiance en toi? » Et en fait, pas du tout, c’était tout le contraire, j’avais très peur d’aller dans les entreprises et de ne pas convenir. Je me suis dit, mince, comment je fais il faut que je paie mon loyer ? Donc j’ai monté mon business et me voilà.»

Racontée comme ça l’histoire d’Ines parait simple. Et pourtant la jeune femme qui est devenue une des muses d’Armani n’a rien eu facilement. Quand elle est arrivée à Paris elle ne connaissait personne et elle a appris à ne compter que sur elle-même :

« Je ne sais pas ce que c’est que d’être héritière. J’ai vécu avec un compte épargne à 0,92 centimes pendant des années. Quand tu as 10 euros, que tu dois manger tous les jours, trois fois par jour et que tu dois imprimer des CV, tu fais super attention. Moi, j’appelle ça de la survie. C’est une situation dans laquelle je ne veux plus jamais être et je m’en prémunis. »

Cela a donné une force a Ines. Et aussi quelques certitudes. A commencer par celle qu’il faut assurer ses arrières car personne d’autre en pourra le faire.

« Donc j’ai toujours 2 longueurs d’avance et c’est ça que j’ai envie de véhiculer comme message, que tu n’es pas obligé-e de naître avec cette sécurité tout autour de toi, ces espèces d’airbags qui viennent t’empêcher de te heurter aux murs et de te faire mal. Tu peux la créer, tu peux la faire, ça prend du temps, mais ça se fait et tout le monde peut le faire.
On demande parfois à des femmes inspirantes « Comment on fait pour devenir toi ? » Cette question-là, elle me fascine parce qu’en fait, il faut vivre sa vie, il faut repartir de sa naissance, ses épreuves, ses blessures, ses succès, ses craintes, les risques qu’elle a pris, les claques qu’elle a pris. Et ensuite, tu peux espérer éventuellement, devenir elle ou comme elle. »

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