Femmes et hommes sont en complémentarité, pas en rivalité

Lucille Desjonquères, chasseur de tête

La parité, où en sommes nous ?

Depuis 22 ans Lucille Desjonquères dirige le cabinet de recrutement qu’elle a cofondé.
Un lieu particulièrement fin d’observation et d’analyse des mouvements de l’entreprise sur les sujets des Ressources Humaines. La question de la parité s’impose à elle il y a dix ans, elle crée en 2019 Les Assises de la Parité.

Interview par Florence Dauchez
Publié le 27/06/2022

FD : – Les hommes ont-ils pris la mesure du sujet de la parité ?

LD :- Beaucoup de femmes disent : « – J’arrive, il y a huit hommes dans la salle. Je suis la seule femme. J’ai une posture difficile à trouver parce que je sens qu’en face de moi, il n’y a pas forcément un accueil très chaleureux. Parce que j’allais dans des événements de gender equality qui me mettait en colère parce que sur scène, il n’y avait que des hommes et dans la salle, il n’y avait que des femmes.

Et nous n’avons pas besoin, nous, d’être convaincues de notre capacité à faire. Ça m’a donné envie de créer les Assises de la Parité où il y aurait autant d’hommes que de femmes dans la salle et autant d’hommes que de femmes sur scène. Et c’est ainsi que les assises de la parité sont nées.

FD : – Avez-vous perçu un changement de comportement des femmes ? 

LD : – Des femmes j’en rencontre, parce que je suis chasseur de tête, tous les jours, qui n’ont aucun complexe à avoir, et pourtant n’ont pas confiance en elles.

J’ai rencontré il y a quelques jours une polytechnicienne, le Graal du diplôme d’ingénieur, elle m’avoue pendant l’entretien qu’elle n’a pas confiance en elle. Et là je me dit : « mais jamais je n’ai rencontré un homme polytechnicien qui m’a dit ne pas avoir confiance en lui. Et je lui ai dit : – mais, pourquoi ? Et elle était incapable de l’expliquer. C’est comme ça, dans sa posture de femme, elle avait des efforts à faire en ce sens.

Oui, les femmes n’ont pas confiance en elles. Oui, les femmes ont beaucoup de difficultés à parler d’argent quand il s’agit de leur salaire, pas des contrats à négocier pour leur entreprise. Et sur ces sujets-là, les Assises de la Parité ont une ambition, c’est de les aider, par des ateliers de soft skills, à se dépasser elles-mêmes pour se débarrasser de leurs propres biais.

FD : – les législateurs se sont prononcés en faveur de la parité dans les conseils d’administration et comités exécutifs, avez-vous mesuré de premiers effets ?

LD : -Il y a un mouvement qui est en route, à la fois porté par des quotas où on veut mettre des femmes tout là-haut dans les entreprises, dans les instances ou des conseils d’administration ou plus récemment dans les comex, le comité exécutif, là où le pouvoir opérationnel réside. Pour qu’en verticalité ces femmes qui sont au sommet pensent à aider toutes les femmes à toutes les strates de leur carrière et identifient les hauts potentiels et les aident à se déployer.

Et oui, en réponse à votre question, il y a aujourd’hui, ce n’est pas comparable, mais si on si on lâche la bride, je pense que les mauvaises habitudes pourraient revenir aussi rapidement. Donc il faut continuer à être vigilants, continuer à être proactifs, et je dis proactifs et vigilants exprès parce que c’est un travail de femmes et d’hommes. C’est le rassemblement des femmes et des hommes qui vont faire monter les femmes en compétences.

Il ne faut pas qu’on commette les mêmes erreurs, à savoir stigmatiser les femmes d’un côté, stigmatiser les hommes de l’autre. Nous ne sommes pas en guerre, nous ne sommes pas en rivalité, nous sommes en complémentarité pour de la performance.

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