« On veut recevoir plus de femmes sur les plateaux TV ! »

Laure Closier, journaliste BFM Business

10 femmes pour 40 hommes sur les plateaux de TV 

Laure Closier co-anime la matinale de BFM Business qui s’appelle Good Morning Business. Elle suit l’actualité économique de tous ceux qui veulent venir sur le plateau.

FD : A quoi ressemble une journée type ?

« Alors les horaires, c’est un gros gros sujet, C’est quasiment le principal sujet. Moi, je me lève à 2 h du matin tous les jours. 6 h, on prend l’antenne, 9 h, on rend, à 9 h, on enlève tout. J’arrive à partir vers 10 h et demie et je suis chez moi vers 11 30, je mange, je dors. Je me réveille à 15 h, j’ai 1 h pour être tranquille. J’ai à nouveau une conf à 17 h. À 17 h, on reparle des sujets du lendemain. Et après, à 17 h 30, je vais à l’école chercher mes enfants et après là, ça s’accélère. Donc on dîne, on se couche à 8 h et demie et c’est rebelote. On se lève à 2 h. »

FD : Pourquoi peu de femmes sur le plateau ?

« Elles ne viennent pas. Très clairement. La réalité, c’est qu’on les appelle et qu’elles disent non. Les femmes, je les ai comptées à un moment, j’arrivais à peu près à un ratio de 10 femmes pour 40 hommes. J’explique par plusieurs choses. La première, c’est que moi, je les appelle toujours la veille, pour le lendemain. C’est le principe, mais c’est pour tous les invités pareil. Donc il y a vraiment d’organisation. La deuxième explication qui à mon avis, faut mettre sur la table, c’est le fait de penser que venir dans les médias, ça ne sert à rien. Cette vision de l’homme qui est dans les médias, elle n’est pas vue positivement par les femmes, donc elles refusent. Il y a plein de femmes expertes sur les robots. On a jamais réussi à faire venir une femme. Parce que, troisième problème : je suis experte du robot A, donc je ne veux pas parler du robot B. Et il est hors de question que vous m’interrogiez sur ce sujet, parce que je ne pourrais pas répondre, donc je préfère ne pas venir. Jamais vous n’avez ce problème avec un homme. Donc là, on a une combinaison de facteurs qui fait qu’en fait, sur mon plateau, j’ai que des hommes. »

FD : Pourquoi il faut y aller ?

« Le fait d’avoir un manque de rôles modèles pour nos filles, pour nos garçons, pour voir que c’est possible, qu’on a des modèles de pouvoir, qu’on a des gens qui dirigent, que ça existe, que le pouvoir est exercé différemment qu’uniquement par des hommes. Ça, c’est un problème de rôles modèles, mais on n’a pas de rapport à la parole sur les plateaux. C’est à dire que quand j’ai une seule femme et que c’est la première de ma matinale, tout le monde la scrute en disant « c’est qui cette fille-là qui est en train de parler sur BFM Business ? Mais en fait, elle n’y connait rien. » Et peut être qu’elle n’y connait rien. Peut être qu’elle va se tromper, j’en sais rien, mais moi, des hommes qui n’y connaissent rien et qui se trompent, j’en vois plein et ils n’ont ni torrents sur les réseaux sociaux, ni tout le monde qui les regarde comme si c’était des chouettes et qu’il fallait les disséquer. La femme qui vient, mais tout le monde la regarde comme si on était au spectacle ! »

FD : Et toi, pourquoi tu lèves le matin ?

« Parfois, moi, j’ai envie d’abandonner. Mais je me dis je ne le fais pas pour moi. Parfois, je me sens dépassée par une cause, peut être que je me suis inventé moi-même, mais par l’idée de le faire pour toutes les petites filles, pour mes filles à moi, pour tous les petits garçons, pour la société. Je me dis « Tiens, aujourd’hui, je vais aller combattre les stéréotypes. Aujourd’hui, je me lève, je vais aller changer le monde. » Et parfois je rentre chez moi je me dis « Ah bah, j’ai bien changé le monde aujourd’hui, c’était bien, je peux aller me coucher sereine. » Et ça, ça m’anime. Et c’est vraiment l’envie de oui, d’être, d’être utile. »

Interview Florence Dauchez
14
 Juin 2023

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