Oubliées, effacées : leur courage et leurs actes ne figurent nulle part.
Pourquoi ? Qui ? Qu’ont-elles accompli ? Elles étaient partout. Engagées et humbles. Sur Twitter le compte exceptionnel @paroles_la par Jean-Christophe Notin fait revivre ces destins et c’est bouleversant : leur sacrifice, leur grandeur n’ont pas été imprimés ds l’Histoire.
Autant de rôles modèles invisibles. Voici une manière de leur redonner vie et de leur rendre hommage.
Bravo Mesdames, immense respect et admiration.
« Des femmes qui ont été parachutées, qui étaient dans le sabotage, on a… même à des postes subalternes, mais quand même de direction, on a des femmes dans le maquis, il y avait des femmes dans toute la résistance. C’est ça, évidemment, la face cachée de la résistance qu’il était temps de montrer et donc surtout de populariser au maximum.
Jean-Christophe Notin, et mon métier, c’est d’écrire. Ça fait une quarantaine d’années que je m’intéresse au sujet de la résistance, que je rencontre un certain nombre de résistants, que je découvre un certain nombre de parcours et m’est venue l’idée, il y a quatre ans donc, de partager un peu ce petit trésor. D’où l’idée de le faire sur Twitter de manière accessible, rapide, synthétique.
Il faut le faire une fois par jour, un peu comme une posologie anti morosité. J’ai commencé avec les Compagnons de la Libération, ça s’appelait Paroles de Compagnons de la Libération. 1038 compagnons individus, il n’y a que six femmes, donc des retours que j’avais très souvent :
« Vous ne parlez jamais des femmes ! » Mais évidemment, puisqu’il n’y avait que six femmes parmi les compagnons !
Donc c’est là où j’ai décidé d’ouvrir un peu le spectre et d’engager évidemment beaucoup plus la parole féminine, ce qui est indispensable. Un nom qui me vient comme ça à l’esprit : Raymonde le Névé qui était une jeune photographe à Nantes, elle a une petite boutique à Nantes, mais dans l’arrière boutique, elle développait en fait des plans de la base allemande, des bases navales de la région, c’est à dire un rôle fondamental. Ce sont des photos qui ont eu un très grand rôle, ensuite pour les bombardements, etc. Raymonde le Névé a été arrêtée et elle est morte en déportation. Elle est complètement ignorée. On a très, très peu parlé d’elle. Elle mérite tout autant d’être connue qu’un Brossolette, à sa manière.
Ce qui s’est passé ensuite, c’est que les chefs étant principalement des hommes ont eu tendance à récompenser des hommes et à attribuer des médailles aux hommes.
Les femmes, elles, sont restées dans leur domaine d’activités, dans leur foyer, dans leur maisons. Et elles n’ont pas été récompensées, en sachant que les femmes elles-mêmes n’ont pas eu une forte propension à se mettre en avant. Ça, c’est un peu aussi le phénomène du clandestin de la personne qui estime avoir fait son devoir. Elle est retournée à son foyer et elle n’en a jamais parlé. Et l’histoire est restée telle que sous cloche.
Beaucoup de jeunes femmes en particulier, sont très touchées de voir qu’enfin on peut parler des femmes et de les montrer dans d’autres rôles que ceux dans lesquels on les imagine toujours. Les femmes ne se distinguent pas du tout des hommes. Il n’y a aucun déterminisme. Ils le disaient toujours : si je ne l’avais pas fait, j’aurais raté ma vie. »
Interview Florence Dauchez
21 Juin 2023